Il n’y a pas que des lombrics dans les tas de compost. Zoom sur les individus étonnants qui grouillent et travaillent tous ensemble pour transformer le plomb en or.
Vidéo : Iris Petitjean.
Elles vivent aussi dans la litière du sol, et ce sont certaines de leurs représentantes qui fabriquent ces superbes dentelles que l’on voit parfois dans l’humus des forêts, en ne laissant que le squelette cellulosique des feuilles.
Grattons maintenant la surface du compost. Des cloportes courent alors se réfugier vers l’ombre et l’humidité. Les cloportes sont des crustacés (comme les homards) mesurant plusieurs millimètres, visibles sans mal à l’œil nu. Certains se roulent en boule (comme les tatous) autour de leurs 14 pattes (pas du tout comme les tatous) pour se protéger. Ceux du compost sont souvent rosés et duveteux, et mesurent entre 2 et 3 mm. Un cloporte. Photo : Iris Petitjean.
Ce qu’ils aiment, c’est la matière végétale en décomposition, ils sont même capables de digérer la cellulose *. Leur taille relativement grande les place parmi les premiers à venir découper les éléments du compost, qu’ils fractionnent alors en morceaux plus petits que viendront à leur tour consommer les autres travailleurs.
On remarque à présent, parmi les détritus, des structures marron oblongues et segmentées, de un à deux centimètres, qui semblent immobiles… mais s’agitent légèrement à la chaleur. Ce sont les pupes (étape entre la larve et l’adulte) de la mouche soldat (une mouche fine aux chaussettes jaunes). La larve se nourrit de toutes les matières organiques en décomposition, sans préférence. Elle participe grandement à la dégradation de nos déchets car elle est capable de tout manger. L’adulte, lui, ne mange pas : il utilise toutes les réserves accumulées pendant le stade larvaire pour se reproduire, pond dans le compost puis meurt. Une pupe de la mouche soldat. Photo : Iris Petitjean.
Au même endroit, qui ondule entre les débris, on aperçoit une sorte de mille-pattes brun, très fin, qui peut mesurer jusqu’à plusieurs centimètres. Il s’agit de la lithobie, qui s’active dans l’ombre à la recherche de ses proies, brassant et aérant les petits éléments sur son passage. C’est un carnivore, qui se nourrit d’araignées et d’insectes, qu’elle chasse à la course avec ses 30 petites pattes, avant de leur inoculer du venin. Ce dernier est inoffensif pour les humains, mais il paraît que la piqûre est douloureuse. Une lithobie. Wikimedia Commons.
Nous allons creuser un peu plus profond dans le compost, sous la première couche de litière, où s’agitent alors des vers rougeâtres. Il ne s’agit pas de lombrics, qui vivent plus profondément dans le sol, mais de vers du genre Eisenia, de grands gloutons de matière organique, qui se retrouvent souvent agglutinés. Ce sont les vers utilisés dans les lombricomposts. Eux aussi sont d’infatigables décomposeurs, et se reproduisent très vite, produisant encore plus de bouches voraces en un temps record. Des vers rouges (Eisenia). Photo : Iris Petitjean.
Peut-être aurez vous l’honneur, un peu plus profond, de découvrir au calme, réfugiée dans l’obscurité et loin de l’agitation de la surface, une larve blanchâtre de plusieurs centimètres, à la tête minuscule et au postérieur très rebondi, avec six courtes petites pattes. Il s’agit de la larve de cétoine, qui dévore les végétaux morts et qui peut, elle aussi, dégrader la cellulose. Elle se charge de décomposer les parties les plus dures des végétaux, une fois que ses prédécesseurs en ont consommé les parties les plus molles. Patience : les larves passent deux ans dans le sol, avant de se transformer en un superbe coléoptère vert métallique aux formes anguleuses. La larve de cétoine (Wikimedia commons).
Même si beaucoup des animaux décrits ici semblent se nourrir de la même chose – la matière organique en décomposition – chacun a sa spécificité. Certains dégradent les éléments les plus récents, d’autres ceux qui sont déjà très fortement entamés par leurs prédécesseurs. Certains font des trajets très importants entre leurs divers points de nourrissage, et aèrent ainsi le compost, d’autres sont plutôt sédentaires. Chacun a sa niche, son taux d’humidité, d’aération et de luminosité de prédilection, et c’est la conjonction de toutes leurs caractéristiques qui permet de dégrader l’intégralité du compost.
Je n’ai pas parlé d’autres organismes tout aussi importants dans le processus de décomposition : les champignons. J’ignore en effet, à mon grand dam, tout de ce règne magnifique. Cependant, ils s’agit des premiers à venir coloniser le compost : les moisissures en effet sont présentes partout, et se développent parfois dès qu’on place les déchets dans le seau, preuve que leurs spores étaient déjà là, sur les peaux, les tiges, etc.
Tout ce petit monde, en se nourrissant, va donc assimiler la matière organique que nous nous considérons de notre point de vue comme un déchet. Ces ressources précieuses seront alors utilisées pour leur vie. C’est pour cela que le volume de compost diminue : il est tout simplement mangé ! Lorsque plus personne n’y trouve à se nourrir, que le tas grouille moins, c’est alors signe que le compost est mûr : les éléments nutritifs sont désormais trop petits pour être assimilés par les animaux décomposeurs, mais les plantes, elles, sauront grâce à leurs racines y trouver leur aliment et tous les éléments minéraux. À vous de l’utiliser pour vos plantations !
* La cellulose est une structure très solide des végétaux (utilisée pour faire le papier) que peu d’organismes savent découper pour l’assimiler. Nous, on ne le peut pas, mais dans notre alimentation elle fait partie des fibres alimentaires, qui restent sans être digérées dans l’intestin et favorisent le transit. Si nous possédions les enzymes des cloportes, alors les haricots verts feraient grossir, puisqu’on assimilerait les calories de leur cellulose !
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